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Travail

Vis mon job d’auxiliaire de vie à domicile auprès des personnes âgées

Ce lecteur de Rockie est auxiliaire de vie depuis quatre ans. Un job mal rémunéré et souvent mal considéré, alors qu’il a beaucoup de sens pour la société. Voici son témoignage.

Avant de démarrer mon témoignage, j’aimerais juste préciser que je n’évoquerai pas dans mon texte les cas de maltraitances ou d’abus commis par certain·es auxiliaires de vie. Oui, cela existe, mais ce n’est pas le sujet que j’ai envie d’aborder ici.

Il y a 4 ans, j’ai saisi une opportunité pour devenir auxiliaire de vie, au moment où j’avais vraiment besoin d’un travail. J’ai fait ça pendant deux ans, puis j’ai fait une pause avant de recommencer cette année.

Pendant tout ce temps, j’ai pu voir et observer différentes réactions au moment de l’énonciation de mon travail, notamment pendant les covoiturages.

Les réactions face à mon métier d’auxiliaire de vie

Souvent, quand je commence à parler de mon travail, la conversation alors complètement gaie et fluide s’arrête brusquement. S’ensuit un silence gêné ou un « Ah » suivi de la question « Et sinon, tu as fait quelles études ? ».

J’ai eu rarement des réactions positives du style : « Je comprends, ma mère est infirmière ».

Il faut dire qu’il y a des préjugés tenaces sur ce métier : – Les auxiliaires de vie « torchent le cul des vieux » – C’est un métier fait par des personnes qui n’ont aucun diplôme – Ce métier ne demande aucune faculté spéciale – On fait juste le ménage Etc.

Pourquoi faut-il qu’un membre de leur famille travaille dans le milieu médical pour que les gens reconnaissent la valeur de ce métier ? Et pourquoi être infirmière impose le respect alors que le métier d’auxiliaire de vie est traité comme un statut subalterne un peu bâtard ?

Aide-ménagère ou auxiliaire de vie ?

Il existe une différence entre les métiers d’aide-ménagère et d’auxiliaire de vie, tout comme entre l’infirmière et l’aide-soignante. Il y a même plusieurs degrés dans le statut d’auxiliaire de vie, selon l’expérience et la formation, et les agences dirigent les personnes vers des situations adaptées à leurs compétences.

Certaines personnes âgées admettent rarement que le fait d’être simplement à leur domicile relève déjà du travail, et elles ont besoin que l’intervenant·e exécute une tâche concrète. Le ménage est donc un point d’entrée vers d’autres choses, comme faire les courses, aider à la préparation du repas, jeter les poubelles, boire le café…

Le métier d’auxiliaire de vie demande une formation et un credo : respecter la vie privée tout en intervenant au domicile de la personne, savoir garder une distance professionnelle tout en nouant une relation indispensable au soin, ménager le/la patient·e tout en s’en occupant au mieux. Être polyvalent·e également, apprendre vite, avoir du tact.

Auxiliaire de vie, un métier pour faciliter le maintien à domicile

Finalement, notre métier, c’est de faciliter le maintien à domicile. Ça inclut le ménage, mais aussi de la perspicacité pour s’adapter à une situation qui ne cesse d’évoluer… Savoir proposer en délicatesse de l’aide administrative, culinaire, des sorties, des soins dans le respect de ce qui est autorisé par le cadre administratif (interdiction de préparer les médicaments par exemple)…

Être auxiliaire de vie, c’est aussi tout simplement parfois savoir s’asseoir pour discuter et apprendre à gérer des personnes démentes et/ou dépressives qui ne savent pas (ou plus) prendre soin d’elles-mêmes et qui refusent les soins. Il m’est déjà arrivé de me faire claquer la porte au nez car la personne avait changé d’avis et refusait de me voir. Bref, c’était parfois un peu le loto !

Si certaines personnes sont claires et lucides dans leurs demandes d’aide, d’autres ne le sont pas. Cela demande une attention psychologique et une écoute de l’autre assez impressionnante. Si la personne dit non, dois-je redemander quelques instants après ? Argumenter ? Comment faire si ce que je propose et que l’on refuse est ce pour quoi je suis payé ?

Sans oublier l’endurance physique que demande le déplacement de domicile en domicile et le travail dans la maison. Pire encore quand on arrive dans une maison particulièrement sale (encombrement par des sacs poubelles, odeur infecte…) ou que la personne est très désagréable.

La réalité du travail d’auxiliaire de vie

Le travail est varié, parfois surprenant : jouer à un jeu de société, faire une heure de discussion, négocier pendant une intervention entière pour amener un repas sur la table, conduire chez le médecin, faire la poussière dans un appartement modèle, faire le ménage dans un appartement où un typhon est passé, s’ennuyer (et résister à l’attrait du portable) ou faire le minimum, aider à la doucher, raser, passer prendre la pain, inciter à sortir, remplir des formulaires, s’occuper d’un animal, lever, coucher, masser…

S’il peut y avoir une routine dans certains cas, l’intervention n’est en général jamais la même et une relation professionnelle est de rigueur : la situation peut évoluer, la santé change souvent et la relation peut devenir instable.

Une journée d’auxiliaire de vie peut être épuisante, surtout si la personne a des maladies graves et refuse notre intervention. Elle peut être agréable, quand une bonne relation s’installe et que j’arrive à rendre service et à repérer intelligemment là où la personne a besoin d’aide.

Bref, le métier d’auxiliaire de vie peut être plein de choses, mais il n’est pas ce qu’on montre de lui : non, on ne « torche pas le cul des vieux ».

Auxiliaire de vie, un métier essentiel mais mal rémunéré

Le métier est surtout mal payé pour l’effort que ça demande. Quand on sait que le nombre de personnes âgées et malades est en augmentation, que les accidents rendant des personnes handicapées arrivent tous les jours et qu’ il y aura besoin de plus en plus de personnes travaillant à domicile, je me demande quand on pensera à valoriser financièrement ce métier.

Pourquoi payer aussi mal un travail qui est si utile à la société ? Pourquoi le métier d’auxiliaire de vie souffre-t-il d’une représentation simpliste et négative ?

De mon côté, je ne compte pas rester auxiliaire de vie : je ferai mon chemin ailleurs. Mais de tous les travaux alimentaires que j’ai faits, celui-là a le plus de sens, et je me réjouis de ne pas avoir fini par vendre des assurances. J’ai acquis une belle part d’humanité et d’histoires, j’ai le sentiment de faire des choses concrètes qui aident réellement autour de moi.

J’ai appris à regarder sans pitié les personnes malades ou handicapées : je ne pense plus à ce qu’elles ne peuvent plus faire, je réfléchis à ce qu’elles peuvent encore faire et comment. Je réfléchis à la manière dont je peux les aider au mieux tout en leur conservant leur autonomie au maximum. Leur handicap n’est qu’une condition de plus ou de moins à laquelle il faut s’adapter, il n’y a rien d’anormal.

Un jour, je serai malade et quelqu’un viendra me faire le ménage et préparer mon repas. J’aimerais que la personne qui m’aidera quand je serai âgé soit mieux payée et mieux considérée.

Ce témoignage t’a interpellé·e ? Viens on en parle dans les commentaires !

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